Kevin Mahogany
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17 déc. 2017
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30 juillet 1958, Kansas City, MO - 17 décembre 2017, Kansas City , MO
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© Jazz Hot n°682, Hiver 2017-2018
Kevin Bryant Mahogany,
disparu à seulement 59 ans, est une grande voix du jazz née de la scène de
Kansas City, tout comme sa concitoyenne Deborah Brown présente dans le n°682 de cet hiver. Kansas City est une ville de racines à partir
de laquelle Kevin Mahogany a construit avec sa belle voix profonde, dans la tradition, très blues, une belle carrière malheureusement interrompue le 17 décembre dernier
par ce décès prématuré suite à une crise cardiaque, dans la cité légendaire des
Count Basie Orchestra, Jay McShann, Jimmy Rushing, Big Joe Turner, Charlie
Parker, Bobby Watson, etc., épicentre également des Territory Bands qui
sillonnaient le centre-sud des Etats-Unis, où s’est déroulée une partie déterminante de
l’histoire du jazz depuis les années 1920-1930.
Comme il nous le
racontait dans Jazz Hot n°566 (1999), c’est à la ferme volonté de sa mère qu’il
devait une solide formation artistique dans la musique et la danse. Il a étudié
le piano, la clarinette et le saxophone à la Phillis Wheatley Elementary School, puis à Lincoln High
School, jouant dans les orchestres locaux avec lesquels il débute à seulement 12 ans, bien que ses débuts
professionnels se fassent au chant à 16 ans, avec Eddie Baker's New Breed
Orchestra, après le collège.
Il avait étudié
la musique classique et l’art vocal («une éducation formelle», dit-il), mais
c’est par lui-même, au contact des autres musiciens et sur la scène qu’il s’imprègne
du jazz, pour une part à l’église également. Il a enfin étudié avec une légende du jazz de Kansas City,
Ahmad Alaadeen (1934-2010), un saxophoniste qui a animé la scène jazz de Kansas
City depuis les années 1950 et a transmis l’héritage du jazz.
Kevin Mahogany
était diplômé en art dramatique, en musique et en anglais.
Comme la plupart
des musiciens de sa génération, il a touché à beaucoup de musiques, et d’abord
à celle de la Motown, la soul et le rhythm & blues, et à bien d’autres
musiques moins enracinés: «Quand vous
venez du Middle West, vous chantez tout ce qui peut permettre de payer les
factures», mais comme il le rappelle: «Toujours
avec un peu de jazz. Dès que je l’ai pu, je me suis concentré sur le jazz.»
Il a également
chanté de l’opéra avec un succès certain, fruit de ses études, mais pour le
jazz, c’est notamment au sein de big bands de jazz qu’il s’est formé de 12 à 24
ans, peaufinant son apprentissage grâce à la Charlie Parker Foundation de
Kansas City, ce qui explique aussi la précocité de son talent. Il a joué de
tous les saxophones, même du baryton, pendant 14 ans jusqu’à 1981. Il a
prolongé ponctuellement l’expérience en big band tout au long de sa carrière
comme chanteur.
Kevin Mahogany
cite parmi ses influences Eddie Jefferson, Jon Hendrix et Al Jarreau, des musiciens
qui n’appartiennent pas à la tradition de Kansas City, même s’il a incarné dans
le film de Robert Altman, Kansas City
(1996), Big Joe Turner, une légende de la ville. Son style fait appel au scat,
sans la virtuosité de ses inspirations revendiquées, mais avec la profondeur de la tradition
blues de sa ville. C’est sans doute pourquoi on le compare davantage avec des
chanteurs de la précédente génération comme Billy Eckstine, Joe Williams ou au
style plus lyrique comme Johnny Hartman.
Kevin Mahogany a
enseigné au Berklee College of Music de Boston et à University of Miami, ville
où il résidait depuis 14 ans jusqu’au récent et brutal décès de son épouse (ils
étaient mariés depuis 25 ans) qui l’a beaucoup affecté et a aggravé son état de
santé. Il est alors retourné vivre à Kansas City où il s’est éteint
prématurément, privant le jazz de l’un de ses plus grands talents.
La production discographique, comme le montre son œuvre enregistrée très
réduite eu égard à son talent, ne lui a pas non plus rendu justice, même si ses
pairs musiciens ne tarissent pas d’éloges sur ce chanteur exceptionnel. C’est
maintenant le temps des regrets…
Yves Sportis Photo Tom Tavee by courtesy of Warner Bros. Records
Kevin Mahogany et
Jazz Hot: n°566-1999, n°684-2018
DISCOGRAPHIE Leader CD 1993. Double Rainbow, Enja 7097-2 CD 1994. Songs and Moments, Enja 8072-2 CD 1995. Pussy Cat Dues: The music of Charles Mingus, Enja 9316-2 CD 1995. You Got What It Takes, Enja 9039-2 CD 1996. Kevin Mahogany, Warner Bros. 9362-46226 CD 1997. Big Band, Mahogany Jazz 54675 CD 1997. Another Time, Another Place, Warner Bros. 9362-46699 CD 1998. My Romance, Warner Bros. 9362-47025-2 CD 2001. Pride and Joy, Telarc 83452 CD 2005. To Johnny Hartman: Live at Birdland, Mahogany Jazz CD 2009. The Coltrane Hartman Fantasy Vol.1, Skip 9093-2
Sideman CD 1993. Elvin Jones, It don’t Mean a Thing, Enja 8066-2 CD 1994. Roseanna Vitro, Passion Dance, Telarc 83385 CD 1995. Kansas Citry Soundtrack, Verve 529 554-2 CD 1996. Kansas Citry After Dark, Verve 537 322-2 CD 1997. TS Monk, Monk on Monk, N2K 10017 CD 1997. Jon Faddis, Eastwood After Hours Live at Carnegie Hall, Malpaso 9362-46546-2 CD 1997. Ray Brown, Some of My Best Friends Are Singers, Telarc 83441
VIDEOS 1997. Kevin Mahogany, «Please Send Me Someone to Love» Kevin Mahogany (voc), James Weidman (p), Dave Stryker (g), Tyrone Clark (b), Todd Strait (dm) https://www.youtube.com/watch?v=Rqcy_nFHBOc
1999. Kevin Mahogany, «Yesterday I Had the Blues» https://www.youtube.com/watch?v=XBKBJBVtenQ
2001. Kevin Mahogany & Ray Brown Trio, «My Foolish Heart»,«Green Dolphin Street» https://www.youtube.com/watch?v=kiAr7bxs6Y4
https://www.jazzonthetube.com/videos/kevin-mahogany/remembering-kevin-mahogany.html 2007. Cyrus Chesnut (p) & Kevin Mahogany (voc), Dezron Gouglas (b) Neal Smith (dm), San Javier Murcia https://www.youtube.com/watch?v=JQdMbEM44ko
2010. Kevin Mahogany & Cyrus Chestnut au Duc des Lombards https://www.youtube.com/watch?v=tt2mfWnxBHk
2015. Craig Handy feat. Kevin Mahogany https://www.youtube.com/watch?v=4YKqO6LlfvQ
2016. Kevin Mahogany (voc), Dado Moroni (p), Ulf Wakenius (g) https://www.youtube.com/watch?v=XIr430ldBPw
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