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Music to Silence to Music, A Biography of Henry Grimes

11 nov. 2015
par Barbara Frenz
© Jazz Hot n°673, automne 2015




Music to Silence to Music, A Biography of Henry Grimes
par Barbara Frenz, Northway Publications-London et Parkwest-Miami, Florida, 322p., 2015. www.northwaybooks.com et www.parkwestpubs.com


Barbara Frenz, historienne et poétesse allemande, née en Suisse, contributrice chez Jazz Podium, publie une biographie très approfondie du grand bassiste de jazz Henry Grimes, né à Philadelphie le 3 novembre 1935, ce qui fait du jour de sortie de l’ouvrage un beau cadeau d’anniversaire pour Henry Grimes. Ce détail n’en est pas un puisqu’il a fallu l’opiniâtreté d’une recherche exceptionnelle, avec, on le devine par la richesse de cet excellent ouvrage, un investissement personnel, affectif comme cela se produit parfois, souvent, dans le jazz quand on produit un travail de cette qualité. Nul doute que la poésie, expression partagée par Henry Grimes et Barbara Frenz, y a joué un rôle déterminant.

Doté d’un appareil documentaire précis et précieux (notes, références bibliographiques, index), il ne manque à cette biographie qu’une discographie détaillée et illustrée. L’iconographie, sobre et recherchée, notamment auprès d’archivistes photos de haut niveau comme CTS Images, est à l’image de ce livre: de qualité.

L’ouvrage détaille le beau et long parcours d’Henry Grimes, né dans une des capitales du jazz, Philadelphie, la même année que Jazz Hot, en 1935, une ville qui respire le jazz, en particulier dans ces années 1950 où les créateurs du jazz se bousculent dans les jam-sessions locales devenues légendaires (cf. le Jazz Hot n° spécial 2006 consacré à Clifford Brown), et où s’élaborent les nouveaux accents du jazz.

Une des rencontres essentielles pour Henry Grimes est celle de Sonny Rollins qui préface avec chaleur le livre de Barbara Frenz, avec lequel Henry Grimes va jouer et tourner jusqu’en Europe. Jazz Hot et l’auteur le rappellent avec précision dans divers comptes rendus. Philadelphie est un creuset d’une telle richesse que les rencontres sont nombreuses et riches, et le parcours d’Henry Grimes est emblématique de celui des musiciens apparus dans les années 1950, et qui développent leur art dans les années 1960, au cœur d’un maelström artistico-socialo-politique, car c’est aussi la période de la lutte pour les Droits civiques aux Etats-Unis, de la reconnaissance, sur tous les plans, politique, artistique, des aventures créatives les plus incroyables. Le parcours de Philadelphie à New York, à l’Europe, les rencontres musicales avec Cecil Taylor, Steve Lacy, Don Cherry, Archie Shepp, Pharoah Sanders, Sunny Murray, Albert Ayler, Charles Mingus, McCoy Tyner, musiciens parfois déjà croisés à Philadelphie, et l’ombre tutélaire de John Coltrane, font d’Henry Grimes un grand témoin et un grand acteur de cette période d’ouverture.

Puis c’est l’éclipse, la disparition, épisode aussi très américain, et présent dans nombre de biographies de musiciens de jazz, plus ou moins bien vécu (Sonny Rollins, Miles Davis, Thelonious Monk, Lucky Thompson, etc.) et où beaucoup de musiciens se sont perdus. Pendant trente ans, Henry Grimes s’installe à Los Angeles, quitte les cordes de la basse, se consacre essentiellement à la poésie et semble survivre difficilement, dans la pauvreté, même s’il assume le choix comme une découverte de soi. Le chapitre consacré à ces trente années de disparition est finalement très bref, très concentré comme un trou noir, car le bassiste est peu prolixe sur ce sujet. Il reste de cette période sa poésie.
La redécouverte par Marshall Marrotte en 2002 est le début d’un nouveau parcours musical qui n’a plus cessé depuis et curieusement, il est présent comme un aîné pour les jeunes musiciens de jazz, surtout dans l’esthétique free (William Parker…), qui le reconnaissent comme un précurseur, comme s’il n’avait jamais disparu, phénomène analogue chez les anciens (Fred Anderson…) qui rejouent avec lui comme s’il n’avait jamais quitté la sphère musicale du jazz.

Voici en résumé ce que vous pourrez découvrir détaillé avec beaucoup de témoignages dans cette bonne biographie réalisée par Barbara Frenz. Un ouvrage qui raconte à sa façon le jazz depuis les années cinquante. Sortie le 3 novembre 2015.

A noter enfin que Northway Publications offre une excellente collection d’ouvrages sur le jazz.
Yves Sportis