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David Redfern

22 oct. 2014
7 juin 1936, Ashbourne (Royaume-Uni) - 22 octobre 2014, Uzès (30)
© Jazz Hot n°669, automne 2014

David Redfern à Jazz à Vienne (2000) © Guy Reynard

La photo ci-contre a été prise en juillet 2000, à Vienne, le jour du passage du Monk Tentet. En grand professionnel, David Redfern était présent lors de la balance sonore et l'installation des musiciens. Pour l'occasion, il avait revêtu un T-shirt avec l'une de ses propres photos de Thelonious Monk, prise au cours des années 60. Avant même que la mise en place commence, il était déjà sur scène avec ses instruments de travail : le Hasselblad pour les photos au format 6x6 et le spotmètre pour une parfaite mesure de la lumière, l'œil acéré pour choisir l'angle de prise de vue de son premier cliché. Il en était ainsi de tous les concerts et festivals auxquels il participait. Cette année encore, bien que fort diminué par la maladie, il avait tenu à participer à Jazz à Vienne et à Jazz à Juan, même si, pour la première fois, il n'avait pu être présent au New Orleans Jazz and Heritage Festival. Il avait publié deux livres de photographies de concert. Le premier appelé Jazz Album est paru en 1980. Le second, The Unclosed Eye, évoque l'œil non fermé qui décrit bien sa façon de travailler, un œil pour le viseur de l'appareil et l'autre bien ouvert sur le monde qu'il est en train de photographier. Ce dernier livre paru en 1999 a connu une deuxième édition en 2005 et peut être commandé sur son site web (www.davidredfern.com). Il comporte une amorce d'autobiographie qui nous renseigne sur ses débuts, car le reste de sa carrière demeure bien présente grâce à ses photos.

Son intérêt pour la photographie est né très tôt car son père avait un Kodak Brownie et développait ses photos en mettant le négatif sur une feuille de papier photo et l'exposant à la lumière du jour devant une fenêtre. Très tôt exposé à la musique, il n'aime pas beaucoup la musique classique et lorsqu'il achète son premier disque, son choix se porte sur « Bad Penny Blues » du trompettiste et chef d'orchestre anglais Humphrey Littleton. Après son service militaire dans les transmissions, puis en Allemagne, où il assiste à un concert de Jazz at the Philarmonic avec Dizzy Gillespie et Ella Fitzgerald, il travaille chez Kodak sur une machine qui réalise les perforations dans les films 35 mm. Dans le même temps, il commence à côtoyer la scène du jazz traditionnel anglais. Il fait ses premiers clichés de photographe professionnel au Beaulieu Jazz Festival et revient sur ce festival jusqu'à sa disparition. C'est au cours de celui-ci qu'il réalise ses premiers clichés d'Anita O'Day en couleur en format 6x6. Sollicité pour devenir photo-reporter pour la presse, il préfère se consacrer à la musique. Il fréquente alors les clubs de Londres : le 100 Club et le Marquee. Licencié par Kodak, il choisit de se consacrer à la photo musicale et vit pendant un temps en les vendant à quelques magazines. Sa grande opportunité va venir des plateaux de télévision qui commencent à enregistrer la musique populaire. Il vend ainsi des photos couleurs aux compagnie de disques. Mais bientôt arrivent deux groupes qui vont véritablement lancer sa carrière : les Beatles et les Rolling Stones. Il est présent lors de la première apparition des Beatles à la télévision et prend la célèbre photo des Fab Four autour de la batterie. Tout au long des années 60, il se partage entre le jazz et le rock, aussi bien dans les clubs que dans les grands enceintes. Il participe également au Magical Mystery Tour des Beatles. Etant l'un des premiers à faire des photos couleurs, ses photos de Louis Armstrong, Thelonious Monk et Coleman Hawkins seront choisies plus tard par le service postal des Etats Unis pour une série de timbres. Il devient ainsi l'un des plus importants photographes du jazz et des musiques populaires. En 1980, il est choisi par Frank Sinatra pour être le photographe officiel de l'une de ses tournées.

Des années 70 jusqu'à cette année, David Redfern a sillonné le monde pour participer aux plus grands festivals. Il était reconnu par l'ensemble des musiciens qui savaient que par ses photos il contribuait à faire mieux connaître leur musique. Même affaibli par la maladie, il n'a jamais cessé ses activités.

Alors qu'aujourd'hui certains musiciens et leur entourage cherchent à exercer un contrôle (auxquels les festivals se plient) qui entrave la liberté artistique des photographes, la disparition de David Redfern fait écho à celle de tout un monde, d'un état d'esprit.

Nous pourrons toujours retrouver ses photos dans Jazz Hot, auquel il avait souvent contribué, et chez Getty Images auquel il avait revendu son agence en 2008. Jazz Hot présente ses condoléances à Suzy sa compagne et à ses trois enfants Mark, Bridget et Simon.

Guy Reynard