L’arrangeur et trompettiste Gerald
Stanley Wilson, né le 4 septembre 1918 à Shelby (Mississippi),
s’est éteint le 8 septembre 2014 à Los Angeles.
C’est une figure historique du jazz
qui disparaît avec Gerald Wilson, arrangeur dont la carrière
remonte à l’avant-guerre et dont la créativité artistique ne
s’est jamais démentie, prolongeant même la tradition du big band
avec panache.
Il apprend le piano avec sa mère,
institutrice de son état, puis s’initie à la trompette. Faute de
lycée non ségrégué à Shelby, il doit partir à Memphis pour
étudier. Il est finalement envoyé par sa mère à Detroit où il
étudie au célèbre Cass Technical High School. Musicien doué, il
est sollicité pour remplacer Sy Oliver dans l’orchestre de Jimmie
Lunceford pour lequel il écrit ses premières compositions, « Hi
Spook » et « Yard Dog Mazurka ».
Wilson est incorporé dans la U.S. Navy
pendant la guerre à la Base des Grands Lacs où il joue avec Clark
Terry et Willie Smith. Il s’installe ensuite à Los Angeles où il
organise son premier grand orchestre en 1944. Il enregistre une
cinquantaine de morceaux et connaît un certain succès. Il décide
néanmoins de mettre fin à son big band estimant avoir encore
beaucoup à apprendre. Il suit en tournée l’orchestre de Count
Basie et celui de Dizzy Gillespie.
Sous l’influence de son épouse
Josefina Villasenor, il s’intéressera souvent à la musique
hispano-mexicaine (« Viva Tirado »). A partir des années
50, son professionnalisme et sa créativité en font un arrangeur
recherché sur la Côte Ouest. Il arrange une soixantaine de morceaux
pour Ray Charles, et travaille pour des artistes de variétés, pour
le cinéma et la télévision. Il arrange et compose pour Duke
Ellington, Dinah Washington, Billie Holiday, Sarah Vaughan, Ella
Fitzgerald, Nancy Wilson, Harry Belafonte, B.B. King ou Les McCann.
Il poursuit également son œuvre avec son propre big band,
enregistrant notamment pour Pacific aux côtés de Teddy Edwards, Joe
Pass, Roy Ayers, Bobby Hutcherson, Groove Holmes, Carmell Jones, Bud
Shank et Mel Lewis.
Il enseigne à l’université (Cal
State Northridge, Cal State L.A., UCLA) et anime une émission de
radio sur KBCA-FM de 1969 à 1976. Il écrit aussi pour orchestre
symphonique (Debut: 5/21/72 pour le Los Angeles Philharmonic dirigé
par Zubin Mehta).
Chef d’orchestre au style très
visuel, il fait partie de ces rares leaders dont la direction
infléchit la musique à mesure qu’elle se joue. Il revendiquait
ces mouvements qui permettent de visualiser ce qu’il y a à écouter
(« I choreograph the music as I conduct. You see, I point it
out, everything you're to listen to », interview de 2006 pour
Fresh Air sur NPR)
Accompagné par de musiciens du calibre
de Sean Jones, Jimmy Owens, Jimmy Greene, Hubert Laws, Lewis Nash,
Gary Smulyan, Ronnie Cuber, Ron Blake, Peter Washington, Dick Oatts
et Antonio Hart, il signe une série d’albums particulièrement
réussie consacrée à New York (2003, New York NewSound), Monterey,
(2007, Monterey Moods), Detroit (2009), Chicago, (avec des références
à Puccini et Stravinski sur Legacy, 2011).
Père du guitariste Anthony Wilson, et
grand-père du guitariste Eric Otis, Gerald Wilson est un arrangeur
et compositeur inventif, toujours attentif à la mélodie et au
swing. Il avait réalisé la synthèse du swing basien, des couleurs
West-Coast, ellingtoniennes et hard-bop tout en recourant à des
solistes contemporains. Il laisse une belle œuvre qui fait
intégralement partie du corpus de référence de l’arrangement
pour grand orchestre jazz.