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Pete Fountain

6 août 2016
3 juillet 1930, New Orleans, LA - 6 août 2016, New Orleans, LA
© Jazz Hot n°676, été 2016
Pete Fountain, I Love Paris



«Un autre type blanc de New Orleans qui est monté dans le Nord et se fit une belle réputation -Pete Fountain… Je peux voir New Orleans dans chaque note et riff.»
Louis Armstrong, In His Own Words, p.33-34, 1999, Oxford Univ. Press).

Pierre Dewey Fountain Jr. (alias LaFontaine), en mauvaise santé, était en soins hospitaliers lorsqu'il est décédé le samedi 6 août 2016.

Son père, Pierre «Red» Fountain, jouait de la batterie et du violon. Mais, Pete opte pour la clarinette qu'il débute à l'âge de 9 ans: «My first hero, of course, was Benny Goodman. I don't think anybody came to the clarinet from the Thirties onward without being directly inspired by Benny. When I heard that sound, I was hooked on the instrument». Il dit aussi: «We could all listen to Benny and all those wonderful swing bands on the radio in those days, but since I was from New Orleans, all I had to do was walk out into the street to hear the greatest jazz that ever was. I remember hanging around the Top Hat Dance Hall and listening to musicians like Sharkey Bonano, Raymond Burke, and the Prima brothers, Leon and Louis...That's why I got so interested in jazz when I was a kid».

Pete Fountain a aussi déclaré qu'il a écouté George Lewis. Il travaille encore plus la clarinette que le corps médical lui conseilla «pour développer les poumons», après avoir entendu Irving Fazola (alias Prestopnick), disciple de Leon Roppolo. Faz jouait une clarinette système Albert (contrairement à Pete formé sur le système Boehm): «For years, I tried to get a fat sound just like Faz had.»

Son premier professeur est le cornettiste Johnny Wiggs, à l'école élémentaire McDonough 28. Rene Louape, directeur des écoles publiques de musique le remarque et le recommande à Anthony Valentino. En effet, au bout de cinq ans, Pete était prêt à jouer dans un orchestre de lycée. Il a deux options pour cela, mais quand le directeur d'orchestre de la Warren Easton High, Anthony Valentino, lui dit qu'il a un «fat sound» comme Fazola, il opta pour le Warren Easton Marching Band. Pete prend aussi des cours privés auprès d'Emmanuel Allessandra, clarinettiste et hauboïste du New Orleans Symphony.

Pete obtint son premier job payé (5 dollars pour 4 heures de musique) au Broad Street Social and Pleasure Club. Il y fait la connaissance des frères Freddie et Frank Assunto, trombone et trompette respectivement. Lorsqu'il a 16 ans, il monte, avec les frères Assunto, son premier orchestre, les Basin Street Four qui deviendra le Junior Dixieland Band à la demande des patrons du Parisian Room. L'orchestre remporte le concours du Talent show d'Horace Heidt.

A l'automne de 1949, il est dans l'International Dixieland Band de Phil Zito et en juin 1950, il enregistre son premier disque, pour Norman Granz, au sein du Santo and his Dixie-land Jazz Band (78t Clef 8925 : "Mahogany Hall Stomp”, belle technique à la Benny Goodman avec trompette et trombone dans la lignée Armstrong et Ory). Il y a à ses côtés des pointures: George Girard (tp), Santo Pecora (tb), Armand Hug (p). Il enregistre ensuite avec le groupe de Phil Zito dont fait aussi partie George Girard. Girard et Pete Fountain fondent en 1950 les Basin Street Six. Ces Basin Street Six laissent notamment Dixieland Jazz Concert (1951, Mercury 25111 : "Tin Roof Blues”, beau son de clarinette, bons aigus et style chantant genre Albert Nicholas), Strictly Dixie (1954, "My Inspiration” dans le style d'Irving Fazola, Mercury MG 20151).

The Dukes of Dixieland, Pete Fountain


En 1951, les puristes Alden Ashforth et David Wyckoff, dans la lignée de Bill Russell, choisissent plutôt d'enregistrer la musique rude d'Emile Barnes (cl) avec Lawrene Toca (tp), Albert Glenny (b), Cie Frazier (dm), le couple Pierce, DeDe (tp) et Billie (p) (American Music CD 13).

La déclinaison d'un genre sonne différemment de part et d'autre de la séparation des communautés. Les Basin Street Six sont dissouts en 1954, faute d'engagements et du décès de George Girard d'un cancer du colon à 26 ans. Pete Fountain forme alors son propre orchestre, Pete Fountain & his Three Coins (1954-55). Ce groupe, où il double au sax ténor, enregistre quatre titres en décembre 1954 (Southland 215).

Puis, il passe sept mois à Chicago au sein des Dukes of Dixieland des frères Assunto. Avec ce célèbre groupe il enregistre At the Jazz Band Ball (1955, Vik LX 1025).

De retour à New Orleans, il quitte brièvement la musique à temps plein. On l'entend avec les trompettistes Tony Almerico (1956-57), Sharkey Bonano (disque en 1956) et Al Hirt.

En 1956, il enregistre avec Al Hirt (Los Angeles, avec Abe Lincoln, tb, Ray Bauduc, dm, Southland 215 ; avec Eddie Miller, ts, Xtra 1120). C'est donc avec le très populaire (et virtuose) Al Hirt qu'il fait son vrai comeback au Pier 600 de Dan Levy. C'est là qu'il est repéré par Lawrence Welk.

De mars 1957 à mars 1959, Pete Fountain devient vedette du Lawrence Welk Show, émission TV diffusée depuis la Californie («High Society» en 1957 avec une technique supérieure au très respecté Alphonse Picou). La notoriété de Pete Fountain de locale devint nationale. Un album marque cette collaboration: Lawrence Welk Presents Pete Fountain (1957, Coral 57200). Pete Fountain est pris sous l'aile de Bud Dant qui recrute un big band de studio pour l'album Coral 57284 (1959, que des pointures! Conrad Gozzo, Mannie Klein, Shorty Sherock, Ray Linn, John Best, tp : «St Louis Blues», «Memphis Blues», etc.). On recrute une belle section de sax pour l'album Coral 57333 (1960, Wilbur Schwartz, as, Eddie Miller, Plas Johnson, Babe Russin, ts, Chuck Gentry, bs : «Woodchopper's Ball», «My Inspiration», etc.)

De retour à New Orleans, il achète la French Quarter Inn au 800 puis 231 de Bourbon Street, où il joue en trio puis en combo (1960-74). Les albums sous son nom se font plus commerciaux, bien que de qualité (LP avec Brenda Lee, 1967); signalons Music from Dixie (Hollywood, novembre 1961, avec Charlie Teagarden, tp, Eddie Miller, ts, Coral 757401: «High Society» «Struttin' with SBQ») et South Rampart Street Parade où il cherche à recréer le beat parade de sa ville natale (Hollywood, mars 1963, avec Jackie Coon, tp, Phil Stephens, tu, Moe Schneider, Dick Noel, tb, George Roberts, btb, Paul Barbarin, b dm, Coral 757440).

BAsin street Six


En 1968, sa troisième idole après Benny Goodman et Irving Fazola, Eddie Miller quitte Los Angeles pour un retour au pays natal, New Orleans. Il joue dès lors régulièrement pendant 10 ans, dans l'orchestre de Pete Fountain. Ils avaient déjà fait un disque ensemble, Standing Room Only (mai 1965, avec Charlie Teagarden, tp, Bob Havens, tb, Nick Fatool, dm, Coral 757474: «Memories of You»).

Après les Droits civiques, les barrières communautaires sont plus floues. Pete Fountain joue la petite clarinette en mi bémol lors de la cérémonie funèbre de son ami Paul Barbarin; on le voit aux côtés de l'excellent Louis Cottrell Jr. (cl). On y note aussi la présence d'Oscar Rouzan (as), Emanuel Paul (ts), Jack Willis, Alvin Alcorn, Ernie Cagnolatti (tp), Noone Johnson (bazouka), Wendell Eugene, Clem Tervalon, Frank Demond (tb), Chester Jones (b, dm), Freddy Kohlman, Placide Adams (sn dm), L'Onward et l'Olympia Brass Bands (1969).

Pete est resté attaché à ses racines locales malgré un renom qui le fait jouer au Hollywood Bowl (1966), à Las Vegas et au cours de 59 diffusions télévisées du Tonight Show. Il a plus de 100 albums à son actif dont 3 disques d'or. En 1974, il transfert son club au troisième niveau de la New Orleans Hilton où il reste actif jusqu'à la fin des années 1990. Au XXIe siècle, Pete joue régulièrement au French Quarter Festival, avec Connie Jones (cnt) et son disciple Tim Laughlin (cl). C'est avec Tim que Pete apparaît pour la dernière fois au Jazz & Heritage Festival en 2013.

Pete Fountain a eu une cérémonie funèbre conforme à la tradition locale, avec la chanteuse Irma Thomas à l'office, Tim Laughlin jouant «Just a Closer Walk» (St. Louis Cathedral), et une parade de rue (17 août). Très populaire aux Etats-Unis, respecté pour son professionnalisme par Benny Goodman (qui aimait son vibrato, fort discret au demeurant), il a été rejetté par les critiques français qu'ils soient puristes (passionnés de George Lewis ou Johnny Dodds) ou progressistes. Ses meilleurs disques, réalisés dans les années 1950, montrent un instrumentiste de classe («Sensation Rag», 1957, Tony Almerico, tp, Tradition CD 1047). Il fut à la clarinette l'alter ego d'Al Hirt (très beau «Bayou Blues», 1956, Tradition CD 1047). «He maintained the tradition of New Orleans clarinetists going back to Irving Fazola, Tony Parenti, Charlie Cordilla, Leon Roppolo, Larry and Harry Shields. Pete's legacy is carried on by his protege Tim Laughlin.», a dit Chris Tyle, 7 août 2016.

Michel Laplace


SOURCES: interview de Pete Fountain par Will Friedwald (septembre 2000) dans les livrets des CD The Best of Dixieland (compilation, Verve 549 364-2) et The Best of Dixieland. Pete Fountain (Verve 549 365-2)


VIDEOS

The Funeral of Paul Barbarin, 1969 : Pete Fountain (cl mi b) : Just a Closer Walk
https://www.youtube.com/watch?v=05WCrH-kCgA

Al Hirt (tp) & Pete Fountain (cl), 1979 : Basin Street Blues, When the Saints
https://www.youtube.com/watch?v=NfHamzQ4yq4


Lawrence Welk Show, 1957 : Pete Fountain (cl), Orie Amadeo (contrabass cl), "High Society”
https://www.youtube.com/watch?v=N2S2DrOMPVg

Pete Fountain & Tim Laughlin, Jazz Fest 2013 : Careless Love
https://www.youtube.com/watch?v=_9yf8tZ4mas


The Funeral of Pete Fountain, 17 août 2016 : Second Line (P. Barbarin)
https://www.youtube.com/watch?v=6pxoX-TtGr4

 

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