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Ettore Scola

19 jan. 2016
10 mai 1931, Trevico, Italie-19 janvier 2016, Rome
© Jazz Hot n°674, Hiver 2015-2016







Sans rapport apparent avec le jazz, la disparition d’Ettore Scola n’en est pas moins une nouvelle très triste pour tous les amateurs de culture, de cinéma et de jazz. Il était l’un des monuments de la grande tradition du cinéma italien qui, comme le jazz, puise dans le réel l’aliment de la sublimation artistique, et compte tant de génies, de grands artisans et un état d’esprit artistique d’une exceptionnelle qualité et créativité qui illustrent mieux que tout discours ce que furent les utopies du XXe siècle, dont celle d’un art populaire d’une exigence et d’une qualité surnaturelle. 

Sur ce point, le cinéma italien se rapproche encore du jazz : une utopie en action, mise en œuvre(s) par une multitude de talents fondés sur l’argument essentiel de la création : une conviction individuelle ancrée dans le réel.




Si l’idée de gauche avait à nouveau un jour un sens dans un monde qu’elle a déserté pour cause de disparition de la démocratie, il faudrait qu’elle se ressource à ces deux fontaines si enrichissantes, jamais épuisées, si chaleureuses, porteuses d’un contenu sans équivalent dans aucun des autres arts du XXe siècle.

Ettore Scola est l’un de ces grands noms du cinéma italien et pourtant universel, qui, après Vittorio De Sica, a donné au monde les Roberto Rosselini, Dino Risi, Mario Monicelli, Federico Fellini, Pier Paolo Pasolini, Elio Petri, Francesco Rosi, Alberto Lattuada, Giuseppe De Santis, Luchino Visconti, Luigi Comencini, Marco Ferreri, Franco Zeffirelli, les frères Taviani, Giuseppe Tornatore, Nani Moretti, et d’autres encore…

Ils ont entraîné dans leur tourbillon une pléiade de grands acteurs, hommes et femmes, là encore d’une exceptionnelle intelligence et profondeur.

Ce n’est pas une simple énumération, c’est un panthéon du cinéma d’une densité artistique exceptionnelle, et d’une certaine manière la disparition d’Ettore Scola ferme la porte d’une génération hors norme, même s’il existe encore une descendance plus rare.

Ettore Scola, c’est une quarantaine de films ou de scénarios dans l’histoire du cinéma, des films s’inspirant du réel qui ont laissé des traces chez des millions de spectateurs et ont incrusté en eux le désir d’un autre monde que celui si précisément décrypté, toujours avec cet humour autocritique, sans concession, qui fait la légèreté, la profondeur, la vérité et l’humanité de son art : Nous nous sommes tant aimés ; Une Journée particulière ; Affreux, sales et méchants ; Drame de la jalousie ; La Nuit de Varennes ; La Terrasse ; Macaroni ; Splendor… la liste est longue de ce cinéma qu’on ne se lasse pas de voir et revoir avec toujours plus d’intérêt car la densité du message se perçoit avec le temps qui passe, et plus que de la nostalgie, le regret que ce cinéma n’a pas changé le monde, malgré Miracle à Milan.

Che strano chiamarsi Federico, un portrait de Federico Fellini, est la dernière œuvre d’Ettore Scola, comme un point final aussi logique qu’indispensable de son œuvre.


Avec la disparition d’Ettore Scola, comme on peut le dire de Fellini, Pasolini, Risi… c’est un père spirituel qui disparaît. Il faisait partie de la famille sans qu’on ait besoin de le rencontrer. Il était omniprésent sans s’imposer. A ce titre, il le restera, au moins pour une génération d’amateurs de salles obscures. Arrivederci!

Yves Sportis


Vu sur la toile…
Ettore Scola (à gauche) avec Marcelo Mastroiani (à droite), interview paru sur le site italien Left






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